Le 16 mars 2020, le gouvernement français annonçait l’arrêt complet de l’activité de son pays et notamment la fermeture des commerces non essentiels en raison d’une propagation fulgurante du Covid-19.
Aussi inattendue qu’inédite, une telle mesure a surpris l’ensemble du monde judiciaire qui fut le premier impacté. Les juridictions ont été contraintes de cesser toute activité du jour au lendemain laissant alors des entreprises affaiblies, des familles fragilisées et des vies entières suspendues.
Or, la machine judiciaire, enrayée depuis de nombreuses années, se trouvait d’ores et déjà confrontée à d’importants problèmes d’organisation. Plus encore, celle-ci avait vu son fonctionnement bouleversé par un premier mouvement contre la réforme de la justice suivi d’une mobilisation de la profession des avocats défendant leur système de retraite.
Mais une fois les premiers émois passés suite à l’annonce de la crise sanitaire actuelle, les professionnels du droit ont compris qu’il était impérieux de réinventer leur pratique afin que les conflits existants soient résolus, le lien social maintenu et le dialogue entre les parties préservé.
Les Modes Alternatifs de Règlement des Différends (MARD) s’illustrent alors en remède tant ils pourraient permettre de surmonter de façon efficace un recours à la justice classique pour l’heure quasiment impossible.
La nécessité de développer une culture du règlement alternatif des différends s’est affirmée progressivement depuis une dizaine d’années jusqu’à la réforme de la justice mise en œuvre en 2019 qui a eu pour objectif d’en généraliser le recours.
Cette dernière consacre en effet une conception extensive des MARD. Elle les appréhende comme une alternative à la saisine d’une juridiction étatique et ce, qu’il s’agisse de techniques purement amiables de résolution des différends (conciliation, médiation, procédure participative, transaction), voire de certains modes juridictionnels (arbitrage interne et international).
La médiation et la conciliation désignent le processus de résolution des conflits selon lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord amiable, en dehors de toute procédure judiciaire, avec l’aide d’un tiers.
La procédure participative donne lieu à une convention conclue pour une durée déterminée par laquelle les parties à un différend, assistées de leurs avocats, s’engagent à œuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend n’ayant pas encore donné lieu à la saisine d’un juge ou d’un arbitre ou à la mise en état de leur litige.
La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.
Enfin, l’arbitrage soumet le litige, par convention entre les parties, à un ou plusieurs arbitres. En décidant de recourir à l’arbitrage, en d’autres termes en signant une clause d’arbitrage (clause dite « compromissoire »), les parties optent pour une procédure de règlement des litiges privée en lieu et place d’une procédure judiciaire.
Le Barreau de Paris, conscient des avantages que peuvent présenter ces mécanismes, s’inscrit dans une démarche proactive, menée depuis plus de dix ans, particulièrement en matière de médiation.
De cette démarche né, le 3 juin 2019, un espace dédié à la médiation, mis en ligne sur le site de l’Ordre des avocats. Un site pour le grand public a également été lancé. Il présente avec pédagogie les avantages d’une médiation et son déroulement. Il explique également le rôle de l’avocat, qu’il soit médiateur ou accompagnant, dans ce type de procédure. Cette plateforme offre également une aide au choix du médiateur et la possibilité de consulter l’annuaire des avocats médiateurs.
Le 27 mars 2020, un troisième site dédié à la procédure participative de mise en état (PPME), dont l’usage a été généralisé depuis le 1er janvier 2020 devant toute juridiction de l’ordre judiciaire, quelle que soit la procédure suivie , est venu compléter l’éventail des outils proposés par le barreau de Paris.
L’Ordre envisage par la suite d’élargir ces services à tous les types de MARD.
La pandémie actuelle a suscité un regain d’intérêt pour ces modes de règlement des conflits, qu’il a d’ailleurs fallu adapter au confinement et à l’impossibilité pour les parties de se réunir en présentiel.
Le Conseil de l’Ordre de Paris, dans une démarche solidaire, a mis en place un groupe d’avocats-médiateurs, dédiés tout particulièrement à la résolution en urgence des litiges liés à l’exercice de l’autorité parentale durant la période de confinement. Les modalités pratiques de cette offre ont été spécialement adaptées à la crise actuelle, la médiation étant exclusivement prévue par télé et visio-conférence.
Cette crise met en lumière des outils existants rendus de plus en plus accessibles à tous types de litiges.
À l’issue de cette période de crise, les MARD devront prendre leur pleine place et permettre de désengorger les tribunaux, de rendre des décisions plus souples et mieux adaptées aux litiges mais aussi de réinstaurer le dialogue entre les parties.
Tirons le meilleur des enseignements de cette crise et continuons de développer ces alternatives au contentieux classique pour nos clients qui y gagnent en temps, en énergie, en argent et en bien-être.